Carpe Noctem

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Profite de la nuit...

Étoile artificielle de collimation

L’idée

Cette idée est tirée d’un article de Jerry Oltion paru dans le magazine astronomique Sky & Telescope, édition de Juillet 2022 (p.72-73) qui consiste à utiliser quelques composants simples afin de fabriquer une étoile artificielle. Celle-ci est très utile pour effectuer la collimation de son télescope réflecteur (Newtonien ou Cassegrain par exemple) en plein jour, évitant ainsi de perdre de précieuses minutes de ciel nocturne le soir de l’observation venu.

L’astuce relativement simple consiste à utiliser un oculaire afin de focaliser la lumière émise par une DEL en un point d’un diamètre correspondant à la résolution du télescope à collimater. Pour y arriver, quelques notions d’optique et un peu de mathématiques relativement simples sont requises. Un tuyau de PVC permet de positionner les composants, d’intégrer une pile et un interrupteur.

La théorie

Après quelques acrobaties géométriques et algébriques avec la relation de l’opticien :

(1)   \begin{equation*} \frac{1}{f}=\frac{1}{u}+\frac{1}{v} \end{equation*}

f\:: distance focale d’une lentille convergente,
u\:: distance entre un objet et la lentille,
u\:: distance entre la lentille et l’image de l’objet,

et application à un système optique double, on obtient une relation décrivant la distance requise entre l’oculaire et la source lumineuse (DEL) pour obtenir une étoile artificielle de la taille appropriée à la résolution de l’instrument (le télescope) en fonction des caractéristiques optiques (ouvertures, focales, résolution) des composantes :

(2)   \begin{equation*} d_o_s=f_o\cdot\left[\frac{\phi_s}{20\cdot f_t\cdot\tan{\frac{L_r_e_s}{3600}}}}}+1\right] \end{equation*}

d_o_s\:&: distance entre l’oculaire et la source lumineuse (mm),
f_o\;\:\,&: longueur focale de l’oculaire (mm),
\phi_s\;\;&: diamètre de la source lumineuse ou de son masque (mm),
f_t\;\;\:&: longueur focale du télescope (mm),
L_r_e_s\:&: limite de résolution du télescope selon le critère de Rayleigh ou de Dawes (radians).

Ce dernier paramètre, la limite de résolution L_r_e_s , peut se calculer de deux manières différentes. Selon le critère de Rayleigh, il prend la forme :

(3)   \begin{equation*} L_R_a_y_l_e_i_g_h=1.22\frac{\lambda}{D} \end{equation*}

ou selon le critère de Dawes, légèrement plus contraignant dans le présent contexte :

(4)   \begin{equation*} L_D_a_w_e_s=\frac{115.824}{D} \end{equation*}

\lambda\;\;: longueur d’onde considérée; en général 550 (nm),
D\;: ouverture (diamètre du miroir ou de l’objectif) du télescope (mm).

Pour convertir L_r_e_s en secondes d’arc, on multiplie la valeur obtenue ci-dessus par  \frac{648 000}{\pi} .

L’explication

La limite de résolution telle que définie ci-dessus (Rayleigh et Dawes) correspond au plus petit angle qu’il est possible de résoudre avec un télescope d’un diamètre donné. Par exemple, avec un télescope de 100 mm de diamètre, il est possible de distinguer deux étoiles séparées d’un angle de 1,38 seconde d’arc selon le critère de Rayleigh (une seconde d’arc correspond à \frac{1}{3600} degré). Selon Dawes, il sera possible d’y séparer deux étoiles distantes de 1,16 arcsec. La différence entre le deux méthodes est illustrée sur l’image suivante. Dans les deux cas, l’oeil attentif pourra « séparer » les deux astres. La différence est que le critère de Rayleigh est basé sur les caractéristiques physiques de l’image des étoiles obtenue tandis que celui de Dawes est empirique (c’est-à-dire basé sur l’expérimentation qualitative de nombreux observateurs).

De façon plus concrète, cette information (la limite de résolution) permet de déterminer quel serait la plus petite dimension perceptible d’un objet situé à une distance donnée à l’aide d’un télescope. Par exemple, pour percevoir un objet situé à la surface de la Lune (qui est approximativement à une distance 384 400 km de la Terre) à l’aide d’un télescope de 100 mm de diamètre, cet objet devrait avoir un rayon minimal de :

(5)   \begin{align*} R_m_i_n &=D\cdot\tan{\frac{L_r_e_s}{3600}} \\ &=D\cdot\tan{\frac{L_R_a_y_l_e_i_g_h}{3600}} \simeq D\cdot\tan{\frac{L_D_a_w_e_s}{3600}} \\ \\ R_R_a_y_l_e_i_g_h &=384400\:km\cdot\tan{\frac{1.38\:as}{3600\:as}} \\ &=124\:km \\ \\ R_D_a_w_e_s &=384400\:km\cdot\tan{\frac{1.16\:as}{3600\:as}} \\ &=147\:km \\ \end{align*}

Une différence de 23 km entre les deux calculs peut sembler énorme, mais à l’échelle astronomique et en fonction de la distance Terre-Lune (~385 000 km) impliquée dans ce calcul, il s’agit en réalité d’une petite différence. Les deux valeurs obtenues sont en effet du même ordre de grandeurs à 135,5 ± 11,5km.

Les calculateurs

Comparaison avec les observatoires professionnels

En appliquant ce même calcul aux observatoires astronomiques professionnels, on voit que même les plus grands construits à ce jour n’arriveraient pas à voir de petits objets tellement la Lune est éloignée de la Terre.

Hubble (miroir de 2,4 mètres): 5,15 km
James Webb (miroir de 6,5 mètres): 1,90 km
Very Large Telescope – VLT (miroir de 8,4 mètres): 1,51 km
Extremely Large Telescope – ELT (en construction, miroir de 39 mètres): 317 m